2019, la claque et les montagnes russes

photographie argentique double exposition parc montréal
photographie argentique double exposition parc montréal

2019, tu as commencé par un raté.

A minuit, j’étais dans une rue pas très jolie, à chercher un feu d’artifice, qui s’est avéré à moitié caché en bas par un bâtiment, et en haut par les nuages.

Déjà dix minutes avec toi, 2019, et j’étais transie de froid pour rien.

J’aurais du me douter, que tu m’avertissais, que ces premières minutes donnaient le ton de mon année.

L’année des ratés. L’année des tentatives avortées, des bonnes idées apparentes qui s’avèrent finalement être des catastrophes.

2019, tu as commencé en montagnes russes, des petites d’abord, mais plus j’avançais sur tes rails, et plus les montées étaient difficiles, plus les descentes étaient violentes. Autour de moi, ça hurlait, ça riait, ça pleurait, ça se sentait bien, ça se sentait mal. Et moi, moi j’encaissais. Je faisais comme si c’était pas si gros, pas si violent, pas si pire, comme on dit dans mon nouveau chez-moi.

2019, tu as commencé dans le stress, dans la fatigue, dans le froid extérieur et intérieur. Tu sais que j’aime l’hiver et la neige, oh oui tu le sais mieux que n’importe quelle année, mais tu sais aussi que je ne les aime qu’à l’extérieur. Et moi j’étais glacée, tout le temps. Je tremblais constamment. Et c’était dur.

C’était dur, mais je les ai vus, tu sais, tous les signaux que tu m’as envoyés, tous les petits cailloux blancs que tu as semés sur ma route, comme un petit Poucet qui me montre la voie. Je sais, que j’ai tout ignoré, je sais, que je n’aurais pas dû. Mais que veux-tu, j’avais beau avoir connaissance de mon problème et de sa solution, je ne voulais rien voir. J’avais volontairement la tête dans le sable. C’est normal, on a tous un peu peur du changement, nous les humains. Alors parfois, on est un peu longs à la détente, tu sais.

photographie argentique Vieux port Montréal

Je voyais les signaux qui s’intensifiaient, je l’ai vu, l’avertissement que tu m’as collé en mai, j’ai vu le stress et l’incertitude s’accrocher à moi pour finir par m’accompagner partout, compagnons encombrants à chacun de mes pas.

Je sais, je te vois d’ici, passer ton année à lever les yeux au ciel en disant « j’ai beau lui coller l’évidence sous les yeux, cette abrutie ne comprend rien ». Je ne peux pas te dire que c’est faux, tu as raison. Quelque part, je comprenais, j’avais juste peur. J’avais juste perdu confiance en moi, et en ma capacité à y arriver seule.

Je sais, je sais, ne dis rien, s’il te plait.

Au milieu de toutes ces descentes, en haut des montées, il y avait quand même de belles choses à voir, tu sais, et pour ça, je ne te remercierai jamais assez.

2019, avec toi, j’ai rencontré la calligraphie. J’ai aimé ça, bien plus que ce que je n’aurais pu imaginer, et même si j’ai du mal à trouver le temps, depuis quelques mois, je sais qu’elle et moi on va faire un bout de chemin ensemble.

2019, il y a eu l’hiver et les balades dans la neige, il y a eu l’été et Montréal qui vit, Montréal qui vibre, Montréal qui chante et danse au rythme des festivals. Je l’avais aimée l’an dernier, mais après un hiver entier ici, j’ai vraiment réalisé le pouvoir de l’été dans cette ville.

Il y a eu les amis qui viennent me voir, les retrouvailles avec ceux perdus depuis longtemps.

Oh et puis, aussi, il y a eu la reprise de la danse. Et ça, 2019, c’était la meilleure décision de toute l’année. Parce que tous les moments où j’ai eu la sensation de couler, le cours du mardi a été une bouée de sauvetage à laquelle m’accrocher fermement. J’avais oublié, 2019, à quel point la danse peut libérer les émotions, à quel point elle peut tout adoucir quand la vie nous submerge.

photographie argentique Larmor-Plage Bretagne

2019, enfin, il y a eu octobre. Octobre, ça a été le pire des montagnes russes, le moment où tout le monde hurle et rit en même temps. Le moment où l’on se demande pourquoi diable on a grimpé dans ce foutu wagon.

Moi, j’ai même pas compris comment j’étais arrivée dans ce wagon là.

Alors octobre. Octobre et ses vacances en Bretagne. Octobre et mon océan, le bruit des vagues et l’odeur du vent. Octobre et ma famille, mes amis. Octobre et tous ses anniversaires, y compris le mien.

Octobre et enfin, la paix entre moi et Montréal. 2019, tu m’a joué un beau tour de magie. Alors que je pensais que le retour en Bretagne allait me faire réaliser que je ne voulais pas rentrer au Québec, c’est finalement tout l’inverse qui s’est passé. Au milieu de mes vacances, j’ai réalisé que j’aimais ma nouvelle vi(ll)e, mon nouveau pays. J’ai réalisé que tout de même, j’avais un petit bout de chemin à faire ici.

Alors je suis rentrée, gonflée à bloc, prête à coller mon wagon sur des rails plus tranquilles, et surtout, canadiens.

2019, j’ignore si tu l’avais prévu, j’ignore si c’était pour me donner une leçon, me faire comprendre ce que tu t’évertuais à me dire depuis des mois, mais en rentrant, tu m’as collé une claque magistrale.

Une claque dure, sèche, froide. Une claque qui t’envoie rouler par terre et te laisse hébété, la lèvre fendue, un gout de terre et de sang dans la bouche, la surprise et l’incompréhension dans les yeux.

C’était dur, 2019, et à la fois ça allait de soi. Je n’ai pas eu le temps de me poser trop de questions, parce qu’il fallait réagir vite. Elle avait des conséquences, ta claque, et je n’avais pas vraiment le temps de trainer sur le chemin en essuyant ma lèvre sanguinolente. Il fallait mettre de côté, vite, la douleur et le goût de terre, il fallait prendre les mesures qui s’imposaient.

Et je l’ai fait.

2019, je ne sais pas comment tu as fait, mais je me suis impressionnée, en octobre et en novembre. J’ai compris, presque immédiatement, que je ne pouvais pas me laisser sombrer. J’ai dégagé sans ménagement mes potes stress et incertitude, j’ai pris mon courage à deux mains, et j’ai traversé la tempête.

J’ai réagi sur les urgences, j’ai laissé le reste à plus tard, je me suis entourée au maximum, et surtout, je me suis offert la douceur dont j’avais besoin depuis des mois, peut être même des années.

photographie argentique gare du palais Québec

C’était dur, 2019, mais j’ai tant appris sur moi que si je pouvais choisir, tu sais, je garderais tout. Je garderais la claque, je garderais toutes les emmerdes qui sont venues avec.

Je garderais la libération que je ressens maintenant, depuis que j’ai roulé dans la terre sans comprendre ce qu’il se passait.

Je garderais cette force avec laquelle j’ai traversé cette épreuve, et cette confiance en moi qui revient.

Je garderais toutes les leçons que j’ai apprises, en seulement quelques semaines. Parce qu’elles sont précieuses.

Je garderais cette fierté, légitime, que j’ai, à écrire ces lignes, à me dire que j’ai pris l’un des évènements les plus pourris de ma vie, et que j’ai choisi de n’en tirer que le positif.

2019, après m’avoir fait bouffer la poussière, peut être que tu as estimé que c’était assez, peut être que tu as voulu me récompenser, je l’ignore, mais tu as fini par m’envoyer décembre.

Alors voilà, décembre est arrivé, décembre m’a prise dans ses bras avec douceur, m’a caressé les cheveux tendrement, décembre m’a chuchoté à l’oreille que c’était fini, que tout irait bien, maintenant.

Je l’ai attendu toute l’année, tu sais, ce mois doux, alors je le savoure. Je n’aurais jamais pensé en être capable, et pourtant je m’y abandonne. Je ferme les yeux et je souris. Qui sait combien de temps cette douceur durera, alors j’ai choisi de ne pas y penser et de l’embrasser. J’ai choisi de respirer fort pour ne jamais oublier son odeur. J’ai arrêté de me poser des questions, et j’ai décidé de te faire confiance, 2019.

photographie argentique montreal dumpling

Je crois que c’est ça, la leçon que tu voulais m’enseigner, 2019. Qu’une claque peut être incroyablement violente, et pourtant, être exactement ce dont on a besoin. Que même perdus dans un horrible wagon de montagnes russes, il existe toujours des gens pour sourire et profiter du voyage.

Et au delà de tout ça, je crois que tu voulais m’enseigner l’une des choses les plus utiles de toute ma vie. Au delà de la confiance que je peux maintenant avoir en toi, je sais quelque chose de bien plus important.

Je sais, maintenant, que je peux avoir confiance en moi. Je sais que je suis capable de traverser les tempêtes, de rafistoler mon embarcation en urgence et d’y aller vaillamment. Je sais que je tiens le coup, à travers tout ça, et que je le tiendrai si ça arrive une autre fois, si ça arrive mille autres fois.

Je n’ai plus peur des nuages, 2019.

Merci infiniment, pour tout.

3 Replies to “2019, la claque et les montagnes russes”

  1. Je te souhaite une année 2020 un peu moins mouvementée que la précédente <3

    1. Merci Jessica ! Je te souhaite aussi une belle année 2020. J’espère qu’elle sera meilleure que 2019 !

      1. Merci 🙂 Une année 2020 clémente pour tous.tes 🙂

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