Il y a quelques années, j’étais complètement fan d’une série dont je tairais le nom, parce que j’ai un petit peu honte quand même. Sache simplement qu’elle mettait en scène une jeune femme fraichement sortie de prison et un cheval de course sauvé in extremis de l’abattoir. Je te le donne en mille, la jeune femme s’est avérée être une excellente cavalière et le cheval de course a révélé un potentiel absolument extraordinaire, ce qui tombait très bien vu que ces deux là avait une relation fusionnelle et quasi exclusive. Bref.
Il arrive un moment dans l’histoire, où le duo commence à avoir un certain succès, et forcément, la cavalière se fait repérer et commence à intéresser les agents. Et là, c’est le drame. Elle se met à douter, à se sentir perdue, à freiner des deux pieds. Elle en parle donc à sa patronne/maman de coeur et lui dit une phrase qui me reste depuis en tête : Tout change si vite.
Je t’avoue, même si j’avais développé une empathie extraordinaire pour cette nana depuis le début de la série, là, je ne la suivais pas. Elle passait de la prison à un certain succès dans le monde des courses de chevaux, monde qui la passionnait, et d’un coup elle disait « ouh la la, non mais on va calmer le jeu là hein, parce que bon, ça change trop vite pour moi quand même ».
J’exagère un peu en disant que je ne la comprenais pas, mais bref, tu vois l’idée.
Je dis ça parce que tu auras surement remarqué que j’ai soudainement disparu ces derniers temps. J’ai disparu du blog, pas mal des réseaux sociaux, disparu de ma page Facebook photo, de partout.
Ces derniers temps, je crois que moi aussi j’ai fait ma crise du tout-change-si-vite.
Tu sais, j’ai toujours aimé le changement. C’est probablement pour ça que la majorité de mes amis a renoncé à suivre mes divers déplacements à travers la France et le monde, probablement pour ça que je suis aussi attachée à l’immatériel, au fait de ne pas trop m’encombrer d’objets, probablement pour ça qu’à chaque fois que je commence à stagner dans mon boulot, je m’ennuie (et du coup probablement pour ça aussi que mes patrons me refilent toujours des missions WTF, pour lesquelles je réponds invariablement que vous savez, c’est un métier de faire ça, et c’est pas le mien, mais que j’accepte quand même toujours, parce que ça va être rigolo).
J’ai essayé plein de sports dans ma vie, changé d’orientation au milieu de mes études pour passer de la biologie au marketing, changé totalement de métier dernièrement, et puis aussi, je porte avec la même aisance le jean basket et la robe de soirée. Le changement, c’est à peu près ce qui me définit.
Mais malgré ça, je me suis quand même rendu compte, ces dernières semaines, qu’il y avait des limites à ce que l’on peut encaisser sans broncher, sans paniquer, sans partir en vrille.
Dernièrement, j’ai eu l’impression que le changement était comme un clown qui me guettait pour surgir à n’importe quel moment sur mon chemin. Un clown, c’est drôle, mais il y a quand même beaucoup de moments où c’est totalement déplacé.
Je sais, je l’avais dit, que je n’attendais pas que 2017 soit douce et facile, mais honnêtement, j’étais loin, très loin de m’imaginer tout ce qui m’est tombé dessus ces 6 derniers mois. Dans le bon comme dans le mauvais, le hasard m’a réservé de sacrées surprises. De ces surprises qui font littéralement exploser tout ce que tu avais prévu dans un futur proche.
Il y a eu de bonnes choses, de beaucoup moins bonnes choses, et tout ça mélangé, ça a donné une drôle de période où mes nerfs m’ont sérieusement joué des tours.
Alors j’ai été incroyablement heureuse, et puis j’ai eu peur, j’ai rêvé, j’ai été en colère, j’ai pleuré et été parfois incapable de me tenir sur mes jambes, j’ai cru en l’autre et perdu espoir, j’ai cassé des choses volontairement, crié très fort, j’ai passé des heures au téléphone en réalisant la chance que j’avais d’être si bien entourée, j’ai aimé et détesté, je suis sortie le soir, le weekend et me suis sentie affreusement seule au milieu de la foule. Et puis, et puis j’ai ressenti l’indécence du bonheur des autres alors que tout en nous crie de douleur et meure un peu.
Meure un peu.
Je ne savais plus trop où j’en étais.
Lorsque je traverse une période de ce type, je finis par me dissocier. A un moment, je ressens trop de choses, trop fort, pour pouvoir continuer à les encaisser. Du coup je m’en extrais. Je crois alors que je suis à côté, juste un peu à côté de mon corps. Je laisse mon esprit, ou peut être mon coeur, se percher sur mon épaule, me surveiller de loin, et pour le quotidien, j’enclenche le mode automatique. Je me coupe de toute sensation, de tout sentiment. Je ne fais plus de sport, je ne lis plus, je n’écoute plus de musique. Parce que ça forcerait la reconnexion, ça me remettrait dedans et plus à côté. Et quelque part, quelque part je sens que cette reconnexion serait insurmontable, qu’elle me ferait sombrer trop profond, dans ces eaux trop sombres que j’ai déjà connues, vers lesquelles je ne veux plus jamais aller.
Plus jamais.
Alors je mets de côté les changements, ceux qui arrivent, ceux qui sont à venir. Je les oublie et j’oublie qu’ils me font peur, j’essaie de ne pas trop m’écouter, je laisse les choses glisser sur moi sans réagir. Je n’en suis plus capable de toute façon. Curieusement, je hais ces périodes où je ne ressens plus rien. Je me demande toujours si je vais rester comme ça longtemps, comme un robot. Je me demande comment je vais gérer quand on va rétablir la communication entre mes sentiments et le reste de mon corps. Ça me fait quand même toujours un peu peur, et en même temps je me dis qu’on doit tous marcher un peu pareil, que quand quelque chose devient intolérable, le cerveau humain met automatiquement nos émotions dans une petite boite bien fermée et la cache quelque part jusqu’à ce qu’on soit prêts à l’ouvrir.
Alors voilà, j’ai passé un mois à aller au boulot, bosser, sourire en façade, rentrer et me coller devant Gilmore Girls toute la soirée, ou presque. J’ai coupé avec tout le reste. Le weekend, j’allais voir une amie, et c’est tout.
Et puis, et puis je crois que la connexion est revenue. Je crois qu’on a réparé la ligne, un peu violemment peut être. Il y a deux semaines, j’ai ouvert les vannes un grand coup. J’ai ouvert les vannes et puis j’ai laissé les émotions revenir. Je leur ai redonné leur place en moi et plus à côté, parce que j’ai senti que je pouvais, aussi. Que j’allais l’encaisser.
Il y a du changement dans ma vie, et puis en moi, beaucoup, depuis le début de l’année. Et l’un de ces changements va impacter très très fort les années à venir. Je ne m’y attendais pas, ou plutôt, je ne m’y attendais plus. Et puis c’est arrivé. Comme ça. J’ai eu peu de temps pour m’y faire, j’ai eu peu de temps pour choisir. J’ai encore un peu de temps pour l’accepter. Un peu moins d’un an, maintenant.
Je me demande, encore aujourd’hui, si c’est vraiment ce que je veux, si je fais vraiment le bon choix, si j’ai fait vraiment le bon choix, si je ne suis pas en train de faire une erreur magistrale. Et puis je me demande, tu sais, s’il y aura des dommages collatéraux à ce changement, qui, d’où je me tiens, mérite plutôt le nom de tsunami, en fait. Et cette idée là me fait peut être encore plus peur que le changement en lui-même.
C’est dingue comme les choses dont on rêve pourtant depuis des années peuvent s’avérer terrifiantes lorsqu’elles deviennent réelles.
C’est sans honte ou presque que je vais dire que je sais de quelle série tu parles *oooops*
Et que en dehors de ça ce billet me parle tout particulièrement en ce moment
Hahaha c’est drôle que tu connaisses, de toute ma vie je n’ai connu qu’une seule personne qui regardait ^^
Je suis désolée que ça te parle en ce moment, et je souhaite que cette mauvaise passe ne dure pas. Courage !