Tête baissée

Quiberon flore

Quiberon flore

On prend des claques, des fois, souvent. On se dit stop, cette fois-ci j’ai compris la leçon, on ne m’y reprendra plus, et puis à quoi bon, hein, après tout. On fait une croix sur certaines choses, on doute, et puis on perd un petit peu l’envie, aussi.

Et puis il y a l’étincelle, tu sais, de vie, d’espoir, de je ne sais quoi, celle qui est là pour te dire que tu es toujours vivant, et que tant que ce sera le cas, tout sera encore possible, tu auras toujours des surprises, des mauvaises et surtout des bonnes, parce que c’est sur celles là qu’il faut se concentrer.

Elle est là, elle est au fond de nous, face à nous, elle nous regarde dans les yeux et au fond du ventre, elle paralyse et électrise, elle fait peur et attire en même temps.

J’ai jamais été très bonne pour fuir, j’ai jamais été très bonne pour pas foncer tête baissée dans n’importe quoi, j’ai jamais été très bonne pour me protéger des éventuels risques. Y a toujours un moment où j’y pense, et puis l’instant d’après je dis et puis merde, tant pis, et puis je plonge.

L’eau est froide, souvent, un peu comme en Bretagne en avril, on a beau y aller avec une combinaison, ça coupe le souffle quand même, on respire fort, trop fort, ça fait mal un peu partout, ça prend dans la nuque et dans les tempes. C’est à la fois agréable et un peu angoissant, d’avoir juste plongé, et que ça nous fasse tout ça.

Quiberon Côte Sauvage

On sait jamais trop si ça va passer, des fois ça passe, et on peut profiter de la jolie sensation qui arrive après, des fois ça passe pas, et on a plus qu’à ressortir de là en comptant nos bleus, en comptant nos bosses, et nos plaies, celles qui deviennent des cicatrices.

J’ai eu plein de cicatrices, certaines sont restées longtemps, mais je les regarde, et je vois qu’elles s’effacent, des fois je me dis que si certaines passent, d’autres rentrent en fait sous la peau, profondément, là où on ne les voit pas, mais où parfois on arrive à les deviner.

J’aime bien regarder les gens, et deviner leurs cicatrices sous-cutanées. C’est assez facile, elles sont souvent cachées par des trop grands sourires, par de l’indifférence feinte. J’ai toujours trouvé que c’était derrière la grande joie qu’on cachait les plus grandes peines, comme si on voulait en rajouter, dérouter les gens vers une autre voie, parce que celle-ci c’est pas la peine de creuser, j’ai même pas mal, tu vois.

On n’est pas très bons pour cacher nos cicatrices, en fait. Et des fois, je me demande à quoi ça rime, de s’évertuer à le faire. Des fois je me demande si en fait ça serait pas plus simple de dire ben là regarde, je sais que ça se voit pas, mais si t’appuies, même pas très fort, ben j’ai mal.

C’est pas grave, je veux dire, d’avoir des zones de douleur, et de pas toujours avoir marché droit à cause de ça. On devrait pas en avoir honte tu sais, ça fait partie de nous, ça fait partie d’un tout, et probablement que sans elles, on serait pas tout à fait les mêmes aujourd’hui, on serait pas tout à fait aimés par les mêmes personnes.

Roche en forme de coeur Quiberon Côte Sauvage

Tu sais moi j’aime les gens qui me montrent un peu leurs cicatrices, même à demi mot ou à demi regard. J’aime ces petits bouts de secrets qui apparaissent, ou parfois transparaissent, à travers leur voix, à travers leurs yeux. J’aime ceux qui, doucement, me donnent des indices sur leurs failles par une petite phrase anodine au milieu d’une conversation, prononcée avec le sourire, toujours. Comme si c’était pas grave, comme si ça ne les touchait pas, comme si ça ne les concernait même pas.

Bien sur que ça touche, bien sur que ça concerne, alors on rend un sourire, aussi, mais doux, celui qui dit je t’ai compris, mais t’inquiète pas, je vais pas insister. Celui qui, plein de bienveillance, effleure un peu la cicatrice, et comme par magie la rend moins douloureuse, moins présente.

Celui qui fait oublier la claque, et nous fait voir l’étincelle qui brille encore en nous, celle qui a toujours été là, mais à laquelle on avait fini par tourner le dos, à force de trop scruter nos cicatrices.

En ce moment, j’essaye de recommencer à écrire, parce que je le faisais plus beaucoup depuis un peu trop de temps. Alors j’ai écrit, et j’ai décidé de partager ça avec toi. Non pas que je considère ce que j’écris comme ayant un quelconque intérêt pour l’humanité, juste que j’avais envie de partager, et de peut être, avoir ton avis.

8 Replies to “Tête baissée”

  1. Il est drôlement beau et juste ce texte, et tes photos sont drôlement jolies.

    1. Merci ma belle <3

  2. Hey ! Il y a beaucoup de belles images lettrées dans ce texte. J’ai été très touchée par la justesse de tes propos, c’est une mise à nu pleine de délicatesse. Bravo.

    1. Merci Pauline, ton commentaire me touche par le choix de ses mots <3

  3. Comme dirait l’autre souvent derrière le masque de clown un être triste veille …
    A méditer. Et bien je suis contente que tu te remettes à l’écriture dis donc bella !

    Bisous ma jolie bretonne 😉

    1. Je ne connaissais pas cette phrase tu vois ! Merci TiteZa. Bisous

  4. Avec un « léger » train de retard……… J’adore ! Je suis ravie de relire un texte de toi, illustré d’aussi jolies photos ! T’as le talent de l’écriture ET de la capture d’images ! Et je suis pressée de lire les prochains essais !
    Bises !!

    1. D'ici et ailleurs dit : Répondre

      Merci beaucoup Hélène. Il faut que je t’envoie un petit mot Facebook pour savoir comment ça se passe sur Paris ! Bisous

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